Cholangite biliaire primitive

Retour au sommaire

Cholangite biliaire primitive

Dans la cholangite biliaire primitive (CBP), le système immunitaire endommage de façon progressive et irréversible les canaux biliaires à l’intérieur du foie, d’où son qualificatif de maladie "auto-immune". L’issue de cette affection chronique a longtemps été l’insuffisance hépatique terminale, avant l’arrivée d’un premier traitement, l’acide ursodésoxycholique, à la fin des années 80.

Peu à peu, dans la cholangite biliaire primitive (CBP), les voies biliaires qui transportent la bile du foie vers le tube digestif sont détruites, sans que l’on en connaisse la cause, d’où le terme de « primitive ». On parle également de maladie auto-immune, car le propre système immunitaire de la personne agresse les cellules de l’organisme, en l’occurrence celles des voies acheminant la bile.

En conséquence, l’écoulement de la bile est bloqué, c’est pourquoi elle est décrite comme une maladie « cholestatique ». Avec d’autres substances, la bile s’accumule alors dans le foie, entretenant une inflammation ou « cholangite » hépatique.

L’état inflammatoire chronique est à l’origine d’une fibrose, c’est-à-dire l’augmentation anormale de la quantité de tissu conjonctif fibreux dans un tissu ou un organe (multiplication des fibroblastes et augmentation de la synthèse des fibres collagènes et/ou élastiques) puis éventuellement d’une cirrhose. Autrefois appelée « cirrhose biliaire primitive », la cholangite biliaire primitive a été baptisée ainsi car on s’est aperçu qu’elle n’évoluait vers une cirrhose que dans moins d’un cas sur deux.

Quelles sont les causes ?

Une susceptibilité génétique existerait, et certains facteurs environnementaux pourraient influer sur le développement de la maladie (infections, tabagisme, exposition à des produits chimiques).

Dans 10 % des cas, la cholangite biliaire primitive est associée à une hépatite auto-immune qui est la destruction des cellules du foie par des auto-anticorps, réalisant alors un "syndrome de chevauchement" ou « overlap syndrome ».

Qui présente un risque ?

Neuf malades sur dix sont des femmes

La cholangite biliaire primitive est une maladie du foie qui touche principalement les femmes âgées de 40 à 60 ans.

Elle est plus fréquente chez les filles de femmes atteintes de cholangite biliaire primitive, sans pour autant que la maladie soit transmissible.

Les examens

Les anticorps anti-mitochondries : l’examen clef du diagnostic

La cholestase (diminution de la sécrétion biliaire) est définie par une augmentation des enzymes appelées phosphatases alcalines, libérées par des cellules biliaires endommagées. C’est, chez les malades a-symptomatiques, l’anomalie biologique qui conduit le plus souvent au diagnostic. De plus, l’augmentation des phosphatases alcalines est indispensable pour retenir le diagnostic. Un indice en faveur de la maladie est l’augmentation isolée des anticorps anti-mitochondries, mais elle ne signe pas pour autant une cholangite biliaire primitive de façon formelle. Ces anticorps sont présents chez 90 % des patients atteints et ne se voient pratiquement jamais en dehors de cette maladie. Si la recherche d’anticorps anti-mitochondries est négative, l’on recherche alors la présence d’anticorps antinucléaires spécifiques (anti-gp210 et anti-sp100).

L’augmentation des anticorps anti-mitochondries est associée à des niveaux élevés de phosphatase alcaline.

On observe également un niveau excessif des enzymes gamma-glutamyl transférases (« Gamma GT »), et dans une moindre mesure, celui des transaminases.

L’élévation du taux de bilirubine (bilirubinémie) permet de grader la sévérité de la maladie : inférieur à 17 µmol/l, la maladie est bénigne, supérieure à 50 µmol celle-ci est avancée. Néanmoins la bilirubinémie peut rester dans la norme même chez des personnes atteintes.

Un taux de cholestérol anormal (hypercholestérolémie) est constaté chez plus de la moitié des malades, les cellules du foie excrétant le cholestérol avec la bile dans les intestins.

Afin de confirmer le diagnostic et d’éliminer d’autres maladies hépatiques potentielles, une batterie d’examen est ensuite prescrite, à commencer par une échographie abdominale suivi d’une imagerie du foie (IRM, scanner). La biopsie hépatique n’est pas systématiquement nécessaire au diagnostic. Cette ponction à l’intérieur du foie à l’aide d’une aiguille permet de rechercher des lésions en faveur du diagnostic de la maladie. Il arrive en effet, dans 10 % des cas, que les anticorps spécifiques soient malgré tout négatifs et la réalisation d’une ponction biopsie hépatique est alors indiquée pour poser diagnostic de cholangite biliaire primitive dite « séronégative ».

Un FibroScan® (élastométrie impulsionnelle), examen indolore et non invasif, mesure l’élasticité du foie et donc le niveau de fibrose.

Les traitements

Une maladie sous contrôle

Faute de traitement, avant 1987, la cholangite biliaire primitive évoluait progressivement en 15 à 20 ans. Sans traitement, la survie médiane sans transplantation est estimée à 10 ans. L’acide ursodésoxycholique (AUDC) fut le premier traitement à être mis au point. Il reste la référence actuelle, avec une excellente tolérance.

Il a révolutionné la prise en charge de la cholangite biliaire primitive : les malades répondeurs au traitement par acide ursodésoxycholique ont une survie sans transplantation identique à celle de la population générale. Comme il agit comme un acide biliaire naturel, il améliore le fonctionnement hépatique et retarde le développement de la fibrose dans le foie. Son efficacité est évaluée sur le taux de phosphatases alcalines qui reviennent vers la normale, à une bilirubinémie inférieure à 17 µmol/l et des transaminases normales ou quasi-normales.

Le pronostic repose sur la fibrose hépatique évaluée par le Fibroscan® tous les ans ainsi que sur la réponse biologique au traitement par AUDC.

En cas d’échec de l’AUDC, et avant de recourir à la transplantation hépatique, un médicament récent peut être tenté, associé à l’AUDC : l’acide obéticholique (AOC). Cet acide biliaire synthétique réduit la cholestase et l’inflammation du foie. Les fibrates, des médicaments hypolipémiants qui ont un excellent profil de tolérance, peuvent également être utilisés en cas d’échec à l’AUDC.

Actuellement, si les médicaments peuvent ralentir son évolution, surtout lorsqu’ils sont donnés précocement, la cholangite biliaire primitive ne peut cependant être guérie. Les médicaments doivent être pris toute la vie et de façon continue.

Seule la transplantation hépatique est un traitement curatif. Grâce au traitement médical par l’acide ursodésoxycholique, les indications de transplantation hépatique pour cholangite biliaire primitive ont été considérablement réduites, atteignant à peine 20 greffes annuelles en France (cirrhose décompensée, ictère avec bilirubinémie supérieure à 50 mmol/l, prurit réfractaire exceptionnellement).

Copyright : © SNFGE, Société Nationale Française de Gastro-Entérologie
Expert / Relecteur : Dr V. Valantin / Dr J-L. Payen
Rédaction : H. Joubert - Dessin : O. Juanati
​Février 2019