CO.132 - Élaboration d’une classification pronostique des tumeurs neuroendocrines pancréatiques indépendante des marqueurs cliniques, biologiques ou pathologiques
Introduction
Les tumeurs neuroendocrines pancréatiques (TNE) sont des tumeurs rares, avec une incidence annuelle d’environ 1/100.000 en France. Leur pronostic est très hétérogène et dépend du caractère fonctionnel, de l’envahissement local et à distance, du taux de KI67, de la différenciation cellulaire et de l’index mitotique. Leur prise en charge thérapeutique dépend aujourd’hui d’une classification histo-pronostique basée sur l’index de prolifération (index mitotique et KI67) et le degré de différenciation, qui ne reflète qu’en partie de leur complexité. Notre hypothèse de travail était que le pronostic est corrélé à une signature moléculaire indépendante des critères cliniques ou pathologiques décrits plus haut. L’objectif de notre étude était de définir des sous-groupes homogènes en terme de pronostic de TNE et cela indépendamment des critères pathologiques ou sécrétoires par une analyse génomique des tumeurs.
Matériels et méthodes
Soixante-six TNE de caractéristiques variées (grade, localisation, sécrétion), opérées entre 2001 et 2018 ont été inclues dans cette étude. L’ARNm tumoral des pièces opératoires congelées a été extraite et séquencée selon la méthode RNA-Seq (Illumina NextSeq500). Après alignement et quantification, les tumeurs ont été classées selon la méthode non supervisée NMF (non-negative matrix factorization), puis les groupes ont été comparés par analyse d’enrichissement. L'objectif de la classification non supervisée est de regrouper un ensemble de tumeurs par une relation de proximité́ entre elles, afin de construire des groupes de tumeurs homogènes, uniquement à partir des données transcriptomiques.
Résultats
L’analyse bio-informatique a défini trois groupes distincts (A, B et C), de pronostic significativement différent (p<0,01). Le groupe A est composé exclusivement d'insulinomes (17 TNEP) de très bon pronostic sans aucune récidive. Le groupe B est composé de TNE non-insulinome de pronostic intermédiaire avec environ 15% de récidive à 5 ans. Le groupe C est composé de TNE non-insulinome de mauvais pronostic, avec plus de 50% de récidive à 5 ans.
Vingt et une signatures représentant tous les types cellulaires pancréatiques ont été définies à partir de 4 études avec analyse du RNA-Seq sur cellules uniques. Le groupe A apparait enrichi uniquement par les 4 signatures de cellules bêta (sécrétrices d’insuline), le groupe B est enrichi par toutes les signatures du tissu exocrine, cellules acinaires et canalaires et le groupe C est enrichi par les 4 signatures de cellules alpha (sécrétrice de glucagon, déjà retrouvé par une étude précédente, 1). D’autres analyses ont montré que ce groupe B est également enrichi en signature de cellules pancréatiques fœtale ou progéniteurs lorsqu’elles sont comparées à des cellules matures adultes. A noter que les tumeurs des deux groupes B et C sont enrichies par les gènes de la transition épithélio-mésenchymateuse.
Des analyses pronostiques révèlent que l’expression de trois gènes codant pour le fibrinogène (FGA, FGB, FGG) est plus importante dans le groupe C comparé au groupe A ou au groupe B ; l'expression de ces trois gènes sépare les TNE en deux groupes de pronostic significativement différent, avec un pronostic plus défavorable en cas de surexpression de ces gènes. Cette signature a été validée dans une cohorte indépendante issue de la littérature. Si les insulinomes sont exclus, seule l’expression de FGG permet de séparer les TNE non-insulinomes en deux groupes de pronostic différent.
Discussion
Conclusion
Parmi les TNE opérées, la classification non supervisée par le transcriptome identifie trois groupes de pronostic distinct et indépendant des critères cliniques et pathologiques. Cette classification permet de différencier trois groupes de biologie différente dont un groupe d’insulinomes similaires aux cellules bêta pancréatiques d’excellent pronostic, un groupe de TNE non-insulinome agressives exprimant des gènes de cellule alpha, et un groupe non-insulinome de meilleur pronostic similaire à une cellule exocrine et au progéniteur pancréatique.
Remerciements