P.167 - Enquête nationale Française sur l’encéphalopathie induite par le 5-FU
Introduction
Le 5-Fluorouracile (5-FU) est une molécule clé pour le traitement des cancers gastro-intestinaux. Ses toxicités les plus fréquentes sont digestives, hématologiques et cutanées, et peuvent être aggravées par un déficit en dihydropyrimidine deshydrogenase (DPD), partiel ou complet. Un autre effet indésirable rare mais grave du 5-FU est l’encéphalopathie. Sa physiopathologie provient d’une hyperammoniémie, qui peut être expliquée par deux mécanismes : une inhibition du cycle de Krebs et/ou un déficit du cycle de l’urée démasqué par l’administration de 5-FU. Actuellement, aucune recommandation n’existe, ni pour la prise en charge et le traitement de l’encéphalopathie induite par le 5-FU, ni concernant la réintroduction du 5-FU. Face au nombre de cancers traités par 5-FU et au manque de données concernant cet effet indésirable, nous avons réalisé une étude nationale rétrospective sur la base Française de pharmacovigilance pour mieux caractériser l’encéphalopathie induite par le 5-FU.
Patients et Methodes
Depuis la création de la base Française de pharmacovigilance en 1986 jusqu’en 2018, nous avons identifié tous les patients ayant présenté une encéphalopathie induite par le 5-FU. Les variables concernant la démographie, les caractéristiques clinico-biologiques, la prise en charge et le pronostic des patients ont été collectées et analysées.
Résultats
Un total de 30 patients a été identifié. L’encéphalopathie induite par le 5-FU a débuté 2 jours [1-4] après le début de la perfusion de 5-FU. Les troubles neurologiques les plus fréquents étaient un trouble de conscience (76%), des convulsions (53%) et de la confusion (40%). L’hyperammoniémie tendait à être plus élevée chez les patients admis en réanimation (250[133-522] vs. 139[68-220] μmol/L, respectivement, p=NS) et chez les patients avec le score de Glasgow le plus bas. Un déficit en DPD a été recherché chez 14 patients et trouvé dans 21% des cas, suggérant un possible rôle du déficit en DPD dans l’encéphalopathie induite par le 5-FU. La mortalité était de 17%, avec 57% de patients admis en réanimation et 73% de récupération neurologique complète dans un délai de 5 jours [2-10]. En plus de l’arrêt de la perfusion de 5-FU, d’autres traitements destinés à diminuer l’ammoniémie ont été proposés, comme le lactulose, un régime pauvre en protéine, la dialyse ou des chélateurs de l’ammonium. Un réintroduction du 5-FU a été réalisée chez 47% des patients après récupération neurologique complète, dont un patient porteur d’un un déficit partiel en DPD, dans un délai de 19 jours [18-28]. Une récidive a été observée dans 57% des cas, mais aucune lors de la réadministration du 5-FU à dose réduite, même chez le patient porteur d’un déficit en DPD.
Discussion
Conclusion
Cette étude est la première étude nationale des encéphalopathies induites par le 5-FU, et la plus grande cohorte décrite à ce jour. Une encéphalopathie induite par le 5-FU doit être suspectée et l’ammoniémie dosée chez tout patient présentant des troubles neurologiques après administration de 5-FU. Après récupération neurologique complète, une réintroduction du 5-FU peut être prudemment envisagée, sous strict contrôle clinique et biologique. Des études complémentaires sont nécessaires pour mieux comprendre la physiopathologie de cet effet secondaire du 5-FU, ainsi que la variabilité inter-individuelle observée.
Remerciements