P.200 - Évaluation d’une stratégie préservant l’organe après résection endoscopique d’un cancer superficiel de l’œsophage à haut risque d’envahissement ganglionnaire : radiochimiothérapie ou surveillance rapprochée
Introduction
L’œsophagectomie est recommandée en complément de la résection endoscopique en présence d’un envahissement de la musculaire muqueuse pour les carcinomes épidermoïdes, de la sous-muqueuse profonde pour les adénocarcinomes, ou des critères histo-pronostiques péjoratifs. En effet le risque d’envahissement ganglionnaires dans ces cas est de 8-19% et de 19-21% pour les carcinomes épidermoïdes et de adénocarcinomes, respectivement (1). De plus, la chirurgie est associée à une morbi-mortalité importante ce qui fait que dans certains cas, une stratégie non chirurgicale est envisagée. L'objectif de notre étude est d'analyser les performances d’une stratégie préservant l’organe œsophagien après résection endoscopique d’un cancer superficiel considéré à haut risque d’envahissement ganglionnaire.
Patients et Methodes
Cette étude rétrospective a été réalisée dans deux centres tertiaires entre 2005 et 2019. Chaque patient avait eu une résection endoscopique première d’un cancer superficiel de l’œsophage. Cette résection était définie comme à haut risque devant les critères suivants : caractère peu différencié, présence d’embole veino-lymphatique, invasion pariétale profonde (correspondant à une atteinte de la musculaire muqueuse (m3) ou plus pour les carcinomes épidermoïdes et une atteinte de la sous-muqueuse de plus de 500 μm de profondeur pour les adénocarcinomes). Tous les patients avaient eu une résection histologiquement complète de leur lésion (marges non envahies). Cette résection endoscopique avait été suivie d’une radio-chimiothérapie ou d’une surveillance rapprochée en raison de contre-indications chirurgicales ou d’un refus du patient. Le critère de jugement principal était la survie sans récidive, et les critères de jugements secondaires étaient l’évaluation de la survie globale et de la toxicité des traitements.
Résultats
Quarante et un patients (36 carcinomes épidermoïdes et 5 adénocarcinomes) avec un âge médian [IQR] de 65 [47 – 85] ans ont été́ inclus. La résection endoscopique était de type dissection sous-muqueuse chez 34 patients et de type mucosectomie chez 7 patients. Les tumeurs étaient localisées dans le tiers supérieur, moyen et inférieur chez 5, 23 et 13 patients respectivement. Les critères de résection non curative étaient : tumeur peu différenciée (n=10), embole veino-lymphatique (n=11), envahissement de la musculaire muqueuse m3 (n=8) et de la sous- muqueuse profonde de plus de 200 μm (n=25) pour les carcinomes épidermoïdes, et envahissement de la sous-muqueuse profonde de plus 500μm (n=2) pour les adénocarcinomes. Treize patients (32 %) ont été surveillés de manière rapprochée par endoscopie digestive et scanner tous les 3 à 6 mois. Vingt (49%) et 8 (20%) patients ont été traités par radiochimiothérapie et radiothérapie seule, respectivement. Les traitements reçus étaient hétérogènes : la dose totale de rayons reçue variait de 41 à 64 Gy sur le lit tumoral et les aires ganglionnaires, avec un étalement de 33 à 66 jours, couplés avec une chimiothérapie de type 5FU-seul, 5FU-Oxaliplatine ou 5FU-Cisplatine. La survie sans récidive était de 98% : 100% (13/13) dans le groupe surveillance et 96% (27/28) dans le groupe radio(chimio)thérapie avec un suivi médian [IQR] de 12 [5 – 43] et de 28 [3 – 71] mois respectivement. Il n’y avait pas de différence significative entre les groupes sur le taux de survie sans récidive à 1 et 2 ans. La survie globale était de 83 % : 92 % (12/13) dans le groupe surveillance et 79% (22/28) dans le groupe radio(chimio)thérapie. L’unique récidive était une récidive locale, prise en charge par une chirurgie de rattrapage, sans récidive au décours. Les effets indésirables graves (grade 3 et 4) liées à la radiochimiothérapie survenaient chez 10% des patients et étaient : œsophagite radique et toxicité hématologique (aplasie fébrile). Aucun décès n’était lié au traitement.
Discussion
Conclusion
Notre étude met en évidence qu’une surveillance rapprochée pourrait être une option alternative à l’œsophagectomie systématique après la résection endoscopique d’un cancer de l’œsophage dite à haut risque d’envahissement ganglionnaire, avec un taux de récidive locale de moins de 1% à 1 an. Ces résultats nécessitent d’être confirmés par une étude multicentrique et un suivi plus long.
Remerciements