JFHOD

P.283 - Impact de la pandémie Covid-19 sur le stade et la prise en charge des adénocarcinomes pancréatiques : résultats de l’étude CAPANCOVID

L. Letrillart, M. Brugel, C. Evrard, D. Tougeron, M. El Amrani, G. Piessen, S. Truant, A. Turpin, C. d'Engremont, G. Roth, V. Hautefeuille, J.M. Regimbeau, N. Williet, L. Schwarz, P. Michel, C. Borg, A. Doussot, A. Lambert, V. Moulin, H. Trelohan, M. Bolliet, A. Topolscki, A. Lopez, D. Botsen, C. Carlier, O. Bouché

Introduction

La pandémie COVID-19 causée par le virus SARS-CoV2, a perturbé le parcours de soin en cancérologie, avec une priorisation des ressources en santé. L’impact pronostique des délais de prise en charge des adénocarcinomes pancréatiques (AP) reste inconnu. L’objectif principal de l’étude CAPANCOVID était d’évaluer l’impact de la pandémie COVID-19 sur le stade au diagnostic et la prise en charge des patients atteints d’un AP.

Patients et Methodes

Cette étude observationnelle multicentrique a inclus dans 13 centres français tous les patients diagnostiqués d’un AP entre le 1er septembre 2019 et le 31 octobre 2020 et dont les dossiers avaient été discutés en RCP. Le recueil des données était ambispectif, à partir du 15 avril 2020, avec un suivi planifié jusqu’au 1er novembre 2022.

Les données recueillies comprenaient les caractéristiques générales, tumorales, celles du parcours de soin (dates de consultation/biopsie/imagerie/RCP/traitements, stratégie thérapeutique première (chirurgie/chimiothérapie/soins de support exclusifs/chimio-radiothérapie), les adaptations thérapeutiques et reports en raison de la pandémie ou d’infection COVID19 et celles des infections COVID-19 (fréquence et gravité). Le critère de jugement principal comprenait le nombre de patients diagnostiqués, le stade de la maladie au diagnostic et la stratégie thérapeutique proposée pendant trois périodes définies selon les moments de confinement : la première « avant COVID-19 » du début des inclusions au 29 février 2020 (P0), la seconde « pendant la 1ère vague COVID-19 » du 1er mars 2020 au 11 mai 2020 (P1), et la troisième « après la 1ère vague » à partir du 12 mai 2020 jusqu’à la fin des inclusions (P2).

Résultats

Les 833 patients inclus et éligibles avaient les caractéristiques suivantes :  femmes 54%; âge moyen 69 ans; état général OMS 0-1 80%;  stade: résécable 20%, borderline 13,5%, localement avancé 20%, métastatique 46,5%; traitements : chirurgie première 13%, chimiothérapie d’induction 23%,  chimiothérapie palliative 55%, soins support exclusif 9%.

Le nombre de patients diagnostiqués avec un AP était de 14,3 cas/semaine « avant COVID-19 », de 12,5 cas/semaine pendant la 1ère vague (- 13%), puis de 13,4 cas/semaine (+ 6%). Il n’y avait pas de différence significative des caractéristiques générales de la population et des délais de prise en charge entre les trois périodes étudiées. 

Le stade au diagnostic était significativement différent selon les périodes (p = 0,046): baisse du nombre de patients résécables (18,5% en P1 vs 20,5% en P0 et 21% en P2) et métastatiques (40% en P1 vs 47% en P0 et 47,5% en P2) durant la 1èrevague; augmentation des patients résécables borderline (22% en P1 vs 13,5% en P0), puis baisse à 9,5% en P2; augmentation des stades localement avancés après le premier déconfinement (22% en P2 vs 19% en P0 et P1). Les stratégies thérapeutiques différaient aussi selon la période (p = 0,013): chirurgie première en diminution pendant la 1ère vague (8% en P1 vs 13% en P0), avec un faible « rebond » à 15,5% en P2; évolution inverse des chimiothérapies d’induction (32,5% en P1 vs 25% en P0) puis baisse à 17,5% en P2. Les schémas de chimiothérapie d’induction étaient allégés en P1 (p = 0,03) : FOLFIRINOXm moins utilisé durant la 1ère vague (74% en P1 vs 88% en P0 et 81% en P2) au profit du FOLFOX (14,5% en P1 vs 4,5% en P0 et 5% en P2). 

Quarante patients (5%) ont contracté la COVID-19 avec 17 hospitalisations, 3 admissions en soins intensifs et 5 décès (mortalité 12,5%). Chez 23 patients infectés (57,5%), la chimiothérapie a été reportée, en moyenne de 1,6 semaine.

Discussion

Conclusion

L’étude CAPANCOVID montre une faible baisse du nombre de diagnostics d’AP pendant la 1ère vague, et une diminution des stades résécables d’emblée au profit des résécables borderline, associée à une baisse du taux de chirurgie première au profit des chimiothérapies d’induction. Les résultats suggèrent une augmentation des stades localement avancés au dépend des stade résécables borderline après le confinement. Une analyse de la survie est programmée à 2 ans afin d’évaluer l’impact pronostique de cette « migration » de stade.

Remerciements

Nous remercions les patients et les ARCs/TECs ayant participé au travail. L’étude CAPANCOVID a été soutenue par le Fond d’action du CHU de Reims (projets COVID-19).