Jaunisse (ictère)
Une concentration trop élevée (au-delà de 40 µmoles/litre) d’un pigment biliaire, la bilirubine, confère cette couleur jaune si caractéristique à la peau, aux muqueuses et au blanc des yeux.
La bilirubine est un pigment issu de la dégradation des globules rouges (hématies), du fait d’un processus normal appelé hémolyse. Il est présent dans le sang et l’ensemble des tissus. C’est le principal colorant de la bile. Comme la bilirubine est toxique pour le cerveau, elle doit être évacuée hors de l’organisme. A cette fin, elle est véhiculée dans le sang par des protéines d’albumine. Puis elle s’introduit dans les cellules du foie (hépatocytes) où une molécule dérivée du glucose (acide glucuronique) lui est associée. Ainsi équipée, cette bilirubine dite « conjuguée » passe dans la vésicule biliaire mélangée à la bile, puis est acheminée vers l’intestin grêle (duodénum) via le canal hépatique puis le canal cholédoque. Dans l’intestin, les bactéries de la flore digestive transforment la bilirubine en un autre composé (stercobiline). Ce pigment brun confère aux selles leur couleur habituellement marron.
Pour rappel, lors des repas, la bile se déverse dans le duodénum, où elle se joint au suc pancréatique pour faciliter la digestion des aliments.
Quelles sont les causes ?
La bilirubine, conjuguée ou non conjuguée ?
Plusieurs types de jaunisse dus à des mécanismes divers existent et la décoloration ou non des selles est un indice.
La première est la jaunisse à bilirubine conjuguée, où une anomalie dans la sécrétion de la bile est le plus souvent impliquée. La bile contenant la bilirubine ne peut plus être évacuée dans l’intestin. Elle s’accumule dans le sang et est éliminée dans les urines : c’est une cholestase (« ictère cholestatique »). Les selles sont alors décolorées si l’obstacle est complet et les urines de couleur marron. Des démangeaisons peuvent être présentes (prurit). L’ictère secondaire à une cholestase est dû soit à une obstruction des voies biliaires de gros calibre, soit à une maladie du foie qui limite le passage de la bilirubine conjuguée dans la bile (« ictères hépatiques »).
Les ictères à bilirubine « non conjuguée » ou « libre » sont dus à un excès de production de bilirubine du fait d’une destruction excessive des hématies (anémie « hémolytique »). Ce second type de jaunisse peut également être provoqué par un défaut génétique de conjugaison de la bilirubine dans le foie ; l’enzyme chargée de conjuguer la bilirubine avec la molécule dérivée du glucose fait partiellement défaut (-20 à -30 %). Ce syndrome dit de Gilbert n’occasionne aucun autre symptôme que l’ictère. Il est relativement fréquent et touche 5 % de la population en Occident. Les personnes souffrent en conséquence de jaunisses transitoires, favorisées par des périodes de jeûne, une déshydratation ou une infection. La maladie de Crigler-Najjar est en revanche bien plus grave, avec l’absence ou la quasi absence d’une enzyme fonctionnelle chez les nouveau-nés et nourrissons.
Concernant l’ictère du nouveau-né, le mécanisme impliqué fait lui aussi appel à un déficit modeste en cette enzyme. Il s’agit néanmoins d’un phénomène physiologique transitoire, qui atteint son maximum au 4ème jour de vie de l’enfant. Le taux de bilirubine sanguin doit cependant être étroitement surveillé car cette « bilirubine libre » peut atteindre le cerveau et engendrer des dégâts irréversibles (surdité, épilepsie, retard mental) du fait de l’immaturité de la barrière hématoméningée. Un ictère persistant au-delà d’une semaine et accompagné d’une décoloration des selles fera alors pencher en faveur d’une jaunisse à bilirubine conjuguée, qui peut être dû à une obstruction congénitale des voies biliaires, une infection grave, ou encore des maladies génétiques ou métaboliques.
Les examens
L’interrogatoire, avant les dosages et l’imagerie des voies biliaires
L’interrogatoire par le médecin est primordial et porte sur les antécédents de maladies du foie, sur les médicaments prescrits, sur la survenue éventuelle de calculs biliaires (lithiases biliaires), de cancer etc.
Une douleur d’origine biliaire (au niveau de l’hypochondre droit) - irradiant en hémi-ceinture et vers l’épaule droite) correspond presque toujours à un calcul.
Les symptômes accompagnant la jaunisse (douleurs biliaires, démangeaisons, fièvre, troubles de la conscience, diminution de l’appétit et du poids, symptômes extra hépatiques comme des tumeurs abdominales palpables, des ganglions) ou des douleurs articulaires, pourront orienter le médecin vers une étiologie en particulier.
Une prise de sang est systématique. Elle permet de doser les enzymes hépatiques (transaminases, phosphatases alcalines, gamma-GT) et une protéine synthétisée par le foie (prothrombine). Elle comprend une numération formule sanguine (globules rouges, blancs et plaquettes). Le dosage de la protéine C réactive permet d’évaluer le niveau de l’inflammation.
Par la suite, des marqueurs sanguins peuvent être spécifiquement recherchés, témoignant de la présence de virus des hépatites (A, B, C, E) ou de certains parasites (douve, ascaris).
Dans l’ictère cholestatique dû à l’obstruction des voies biliaires, la réalisation d’une échographie abdominale permet de visualiser une maladie du foie (une tumeur, par exemple) ou la dilatation de la voie biliaire en amont de l’obstacle. Un scanner (tomodensitométrie) peut également être instructif. Dans ce dernier cas de dilatation des voies biliaires, plusieurs examens permettent d’affirmer le diagnostic telle la bili-IRM (Imagerie par Résonnance magnétique des voies biliaires) et l’écho-endoscopie (échographie au moyen d’un endoscope).
Les traitements
Liens utiles
- Jaunisse (ictère) (source AFEF)
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Fiche d’information du patient avant une écho-endoscopie (source SFED et SNFGE)
Expert / Relecteur : Pr C. Bureau / Pr J-M. Péron
En collaboration avec l'AFEF, Association Française pour l'Etude du Foie
Rédaction : H. Joubert - Dessins : O. Juanati
Décembre 2018