JFHOD

C.028 - Rupture artérielle dans les pancréatites aiguës nécrosantes : facteurs de risque et signes prédictifs

A. Guilloux, M. Ronot, A. Jemal Turki, M. Gasperment, P. Lévy, L. de Mestier, F. Maire, B. Jais, V. Rebours, D. Lorenzo

Introduction

La pancréatite aiguë (PA) est une pathologie fréquente, associée à une morbi-mortalité importante dans les formes nécrosantes. Les complications les plus fréquentes sont celles liées à la nécrose pancréatique (infection, compression d’organe). Depuis plusieurs années, ces complications sont prises en charge par une stratégie dite « step-up » qui fait intervenir un drainage endoscopique ou radiologique avant la nécrosectomie chirurgicale. Les complications hémorragiques toutes causes confondues sont également fréquentes (10 à 29% des PA sévères) et sévères (mortalité 31 à 52%). Aucune étude récente n’a étudié les complications hémorragiques spécifiques de la PA causées par une rupture artérielle ainsi que leur mécanisme. L’objectif de notre étude est de mettre en évidence les facteurs de risque de saignement par rupture artérielle au cours des PA nécrosantes à l’heure de l’approche « step-up ».

Patients et Methodes

Il s’agit d’une étude rétrospective, monocentrique de type cas-témoin. Tous les patients diagnostiqués avec une PA et un score de gravité CTSI ≥4 pour lesquels des données cliniques et radiologiques étaient disponibles ont été inclus. Les cas étaient définis comme tout patient pour lequel un saignement par rupture artérielle était identifié. Les données démographiques, les facteurs de risque cardiovasculaire et hémorragique ont été relevés chez tous les patients. Une relecture des imageries a été réalisée : 3 scanners pour les cas (initial, au moment de l’hémorragie et précédent l’hémorragie) et sur 2 scanners pour les témoins (initial et le scanner le plus proche du délai moyen de saignement chez les cas).

Résultats

Entre 2017 et 2019, 148 patients ont été inclus dont 28 (19%) ont présenté au moins une rupture artérielle. La mortalité était significativement plus importante chez les cas (29%) que chez les témoins (6%). Il en était de même pour l’hospitalisation en réanimation (93% vs 58%). Le délai moyen de saignement était de 66±50 jours. Un syndrome de fissuration (douleur abdominale et déglobulisation inexpliquée) précédait le saignement dans 29% des cas. Un drain était au contact de l’artère hémorragique dans 35% des cas. Les anomalies artérielles décrites au moment du saignement étaient : un pseudo-anévrysme dans 37% des cas mais également une artère irrégulière dans 40% des cas, une artère interrompue dans 11% des cas et une artère grêle dans 18% des cas. Une de ces anomalies était déjà présente sur le scanner précédent le saignement dans 46% des cas. Les facteurs de risque indépendants de rupture artérielle étaient la présence d’une anticoagulation curative (OR=4 IC95% [1,4-11,1], p=0,005) et un taux bas d’albumine (OR=1,13 IC95% [1,02-1,25], p=0,025). La présence d’un drain radiologique, endoscopique ou chirurgical et la présence de nécrose au contact d’une artère n’étaient pas associées à une majoration du risque de rupture artérielle. La prise en charge de première ligne a consisté en une embolisation radiologique pour 80% des cas, une prise en charge chirurgicale pour 13% des cas et une surveillance médicale rapprochée seule pour 7% des cas. Une récidive hémorragique a eu lieu dans 33% des cas.

Discussion

Conclusion

La rupture artérielle au cours des PA nécrosantes est fréquente (1 patient sur 5) et associée à une surmortalité. Un pseudo-anévrysme n’était présent que dans 37% des cas au moment du saignement, les autres lésions artérielles à risque hémorragique doivent également être connues et surveillées chez ces patients. La présence d’un drain au contact de l’artère hémorragique dans un tiers des cas doit inciter à la prudence lors de leur mise en place et à une surveillance répétée jusqu’à leur ablation notamment chez les patients à haut risque hémorragique (anticoagulation efficace et hypo-albuminémie). La survenue d’un syndrome de fissuration doit faire réaliser une imagerie injectée au temps artériel pour rechercher et prendre en charge précocement les lésions à risque hémorragique.

Remerciements