Une des principales caractéristiques de la maladie de Crohn est sa capacité à produire une destruction tissulaire sous la forme de sténose. Les sténoses représentent l’une des indications majoritaires de résection chirurgicale au cours de la maladie de Crohn. Dans une étude prospective, Yoram Bouhnik et le GETAID ont démontré l’efficacité de l’adalimumab pour le traitement de la maladie de Crohn sténosante chez des patients présentant des symptômes d’obstruction (Bouhnik Y, et al. Gut 2018 ; 67 : 53-60). Dans cette étude, le critère de jugement principal était un critère composite de succès associant l’absence de prise de corticoïdes ou d’une autre biothérapie, d’arrêt de l’adalimumab, de dilatation endoscopique ou de résection chirurgicale. Après 24 semaines de suivi, deux tiers (64%) des patients présentaient un succès de la stratégie. Après presque 4 ans de suivi, un succès à la semaine 24 ans se maintenait jusqu’à la fin du suivi chez 45,7 % des patients. Si ces données ont été accueillies de façon positive, il persiste une place pour une amélioration de la prise en charge de ces formes compliquées de maladie de Crohn.
L’essai STRIDENT a été conçu pour répondre à cette attente. Il s’agissait d’une étude ouverte, monocentrique et randomisée (2:1), dont le but était de comparer l’efficacité et la tolérance de l’adalimumab soit par une stratégie de traitement intensif (ou treat to target) soit par une prise en charge standard. Les patients adultes, atteints de maladie de Crohn sténosante de novo ou anastomotique, présentant des symptômes obstructifs et présentant des signes d’inflammation active en IRM, pouvaient être inclus. Une sténose était définie comme une réduction d’au moins 80 % du calibre luminal, présent sur toutes les séquences d’acquisition et une épaisseur pariétale d’au moins 3 mm. L’inflammation active était définie par au moins un critère parmi une protéine C-réactive (CRP) ≥5 mg/L, une calprotectine fécale ≥100 µg/g et/ou des signes d’inflammation active en IRM (épaississement pariétal ≥8 mm et/ou épaississement pariétal ≥4 mm et prise de contraste (>100) et/ou un œdème pariétal, et/ou présence d’ulcération selon l’indice d’activité MaRIA). Tous les patients réalisaient une entéro-IRM lors de l’inclusion. Après inclusion, tous les patients recevaient un traitement par adalimumab 40 mg tous les 15 jours, avec un schéma d’induction conventionnel (160/80). Une évaluation était réalisée tous les 4 mois avec une évaluation clinique, le dosage de la CRP et de la calprotectine fécale et une échographie abdominale, ainsi que par une IRM après 12 mois de suivi. Les patients dans le groupe traitement intensif recevait également une thiopurine avec adaptation posologique selon le taux de 6-TGN après 1 mois de traitement. Les patients présentant une inflammation active résiduelle étaient optimisés à 40 mg par semaine puis le cas échéant à 80 mg par semaine. Le critère de jugement principal était la diminution d’au moins un point d’un score clinique d’obstruction, spécialement élaboré pour cette étude.
Au total, 52 patients ont été randomisés dans le groupe traitement intensif et 25 dans le groupe traitement standard. Après 12 mois de suivi, le critère de jugement principal était rempli par 79% des patients dans le groupe traitement intensif contre 64% des patients dans le groupe traitement standard (p=0.17). Si ce résultat n’était pas statistiquement significatif, on pouvait observer un résultat statistiquement significatif en faveur du traitement intensif concernant un succès de la stratégie définie de façon similaire à l’essai CREOLE (90 % vs. 72 %, p=0,05) et une amélioration d’au moins 25 % du score MaRIA (61 % vs. 28 %, p=0,009). Il n’existait par ailleurs pas de différence en terme de recours chirurgical (8 % vs. 16 %, p=0,27) ou de normalisation de la CRP et de la calprotectine fécale (50 % vs. 32 %, p=0,14). Concernant la tolérance des traitements, il n’existait aucune différence entre les deux groupes concernant les évènements indésirables sévères, les infections et les infections sévères et les évènements indésirables nécessitant un arrêt du traitement par adalimumab.