L’immunothérapie néoadjuvante : la référence des futurs essais thérapeutiques dans les cancers colorectaux localisés ?
Société Savante des Maladies et Cancers de l'Appareil Digestif

Domaine concerné
Thérapeutique

Degré d'innovation
Important

Avancement
Recherche clinique

Impact patient

Impact soin
Moyen

Intérêt

Arrivée dans la pratique
Futur lointain

Rédacteur
Docteur Vincent HAUTEFEUILLE

Enthousiasme

À la une 08/07/2021

L’immunothérapie néoadjuvante : la référence des futurs essais thérapeutiques dans les cancers colorectaux localisés ?

Les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire (ICI) sont en passe de devenir la référence de traitement en monothérapie (Ac anti PD(L)1) ou en bithérapie (anticorps antiPD(L)1 +/- Ac antiCTLA4) en 1ère ligne de traitement des cancers colorectaux métastatiques avec instabilité microsatellite (MSI ou dMMR). En situation localisée, peu de données cliniques sont disponibles. L’hypothèse posée est celle d’une meilleure efficacité des ICI à un stade localisé dans les tumeurs MSS et MSI.

 

L’essai NICHE est un essai prospectif randomisé ayant inclus 40 patients avec un  cancer colique (CC) localisé, soit 21 tumeurs MSI et 20 tumeurs MSS, traités en néoadjuvant par une association nivolumab (3 mg/kg à J1 et J15) + ipilimumab (1 mg/kg à J1) +/- celecoxib (randomisation uniquement dans le groupe MSS, dans l’hypothèse d’un effet synergique des ICI et des antiCOX2) puis chirurgie dans les 6 semaines suivant l’inclusion. L’objectif principal était la tolérance et la faisabilité. Celle-ci était, comme attendu, bonne (13 % d’effets secondaires grade 3-4 liés aux ICI, 10 % de fistule anastomotique). Ainsi, tous les patients ont pu être opérés.

 

Dans le groupe CC MSI, une réponse histologique était observée chez tous les patients évaluables (20/20), dont 7 avec une réponse histologique majeure (< 10 % de cellules tumorales résiduelles) et 12 avec une réponse histologique complète.

 

De façon plus inhabituelle, 3 patients sur 15 évaluables du groupe CC MSS avaient une réponse histologique majeure et 1 avait une réponse partielle. L’infiltrat lymphocytaire T CD8+ PD1+ était prédictif de la réponse dans ce second groupe. Comme attendu, la charge mutationnelle y était plus faible. Enfin, le celecoxib ne montrait pas de signe d’activité.

 

Commentaires
 

Cet essai, original de par son analyse de données cliniques et fondamentales, jette la première pierre de ce à quoi pourrait ressembler le design des futurs essais cliniques des CC localisés avec les ICI.

 

L’efficacité (100 % de réponse histologique) est très prometteuse pour les tumeurs MSI, ouvrant la voie à une réflexion sur leur utilisation pour les gros cancers colorectaux, notamment les T4. Cette bonne réponse au traitement est d’ailleurs en accord avec les résultats de cette association dans le CCRm MSI (Overman M, J Clin Oncol 2018) où un taux de réponse radiologique de 55 % était observé.

 

Pour les tumeurs MSS, il démontre une efficacité non négligeable des ICI avec 26 % de réponse histologique, semblant plus élevée qu’avec une chimiothérapie type FOLFOX (7.6 % de réponse histologique TRG3/4 dans l’essai FOXTROT - Seymour M - ASCO 2019). La présence de la cible PD1 sur les LT CD8+ dans l’infiltrat sur les biopsies pré-thérapeutiques des patients répondeurs explique probablement cette efficacité, comme nous le suggérait Ott P et al (KEYNOTE-028) dans l’analyse des facteurs associés à la réponse après immunothérapie, où l’infiltrat lymphocytaire T, l’expression de la cible PDL1 et/ou une charge mutationnelle élevée étaient prédictifs de la réponse au pembrolizumab.

 

Cette question de l’intérêt de l’immunothérapie tumeurs MSS est d’ailleurs posée par l’essai FFCD 1703 - POCHI, testant l’association du CAPOX-bevacizumab au pembrolizumab dans les cancers coliques métastatiques MSS et pour lesquels la pièce opératoire montrait un fort infiltrat inflammatoire.

 

Bien entendu, la principale limite de cet essai est sa taille. Les effectifs sont petits et aucune conclusion ne peut être faite concernant la réponse histologique sur un plus vaste effectif, une éventuelle amélioration de la survie, la durée optimale de ce traitement néoadjuvant, mais il s’agit là d’une belle preuve de concept de l’efficacité de l’immunothérapie.

Références
 
Titre :

L’immunothérapie néoadjuvante : la référence des futurs essais thérapeutiques dans les cancers colorectaux localisés ?

Titre original :

Neoadjuvant immunotherapy leads to pathological responses in MMR-proficient and MMR-deficient early-stage colon cancers

URL : Neoadjuvant immunotherapy leads to pathological responses in MMR-proficient and MMR-deficient early-stage colon cancers
Auteurs :

Chalabi M, Fanchi LF, Dijkstra KK, Van den Berg JG, Aalbers AG, Sikorska K, Lopez-Yurda M, Grootscholten C, Beets GL, Snaebjornsson P, Maas M, Mertz M, Veninga V, Bounova G, Broeks A, Beets-Tan RG, de Wijkerslooth TR, van Lent AU, Marsman HA, Nuijten E, Kok NF, Kuiper M, Verbeek WH, Kok M, van Leerdam ME, Schumacher TN, Voest EE, Haanen JB.

Source(s) :

Article

Références biblio. :

Nat Med. 2020 Apr;26(4):566-576. doi: 10.1038/s41591-020-0805-8

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