Ulcères de l’estomac et du duodénum

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Ulcères de l’estomac et du duodénum

Chaque année, près de 90 000 ulcères gastro-duodénaux sont diagnostiqués par endoscopie en France. A eux seuls, les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et la bactérie Helicobacter pylori sont responsables de la grande majorité des ulcères. Le plus souvent bénins et de régression spontanée, ils se compliquent parfois d’une hémorragie ou d’une perforation des parois de l’estomac ou du duodénum.

Un ulcère gastrique ou duodénal correspond à une perte localisée de substance de la paroi de l’estomac ou de la partie initiale de l’intestin grêle (duodénum). Elle ne concerne pas uniquement la muqueuse - on parle alors plutôt d’érosion - mais détruit la paroi en profondeur jusqu'à sa couche externe musculeuse.

L’ulcère génère des douleurs à type de crampes circonscrites au creux de l’estomac, plus rarement des sensations de brûlure. Elles sont généralement soulagées par la prise alimentaire. 

L’ulcère peut se compliquer d’une hémorragie lorsque la destruction tissulaire concerne un vaisseau sanguin mais aussi d’une perforation de la paroi gastro-duodénale entraînant une péritonite. Plus rarement, le duodénum peut se sténoser, autrement dit occasionner une réduction conséquente du calibre intestinal. 

Le risque qu’un ulcère gastrique soit en réalité un cancer existe, même s’il est faible. En revanche, un ulcère duodénal n’évolue jamais vers un cancer.

Ulcère duodénal et ulcères gastriques
Image : © Pr Frank Zerbib (CHU de Bordeaux)

Quelles sont les causes ?

Ulcères, la faute à une simple bactérie et aux anti-inflammatoires

La prise de médicaments tels que l’aspirine et les anti-inflammatoires non stéroïdiens/AINS, en cures courtes ou prolongées peuvent être à l’origine d’un ulcère gastro-duodénal. Schématiquement, les AINS inhibent des enzymes (cyclo-oxygénases 1 et 2) essentielles à la synthèse d’acides gras dénommés prostaglandines. En temps normal, celles-ci stimulent la sécrétion de mucus protecteur des parois gastriques et refrènent la production d'acide chlorhydrique par l’estomac. 

Entre 15 et 40 % des individus développent un ulcère sous AINS, quelle que soit la voie d’administration, intra-rectale, intramusculaire ou orale. 

La seconde cause principale d’ulcère est l’inflammation chronique de l’estomac appelée gastrite entretenue par Helicobacter pylori, une bactérie résistante aux sécrétions acides. Une personne sur cinq avant 30 ans, et une sur deux après 50-60 ans héberge Helicobacter pylori, qui colonise pendant plusieurs années la muqueuse gastrique.

L’infection à Helicobacter pylori est présente dans 85 % des cas d'ulcère gastrique et dans 95 % des cas d'ulcère duodénal. 

Néanmoins, les mécanismes d’ulcération diffèrent selon la localisation. 

Dans l’ulcère gastrique, les médicaments et la gastrite à Helicobacter pylori fragilisent la couche de mucus qui protège la paroi gastrique. Celle-ci devient vulnérable aux agressions acides du suc gastrique (pH entre 2 et 4). L’ulcère gastrique n’est donc pas à mettre sur le compte d’une hyper-acidité mais d’une baisse des mécanismes de protection de la paroi de l’estomac.

Dans l’ulcère duodénal, cette altération des mécanismes de défense existe aussi, sous l’action des AINS et de l’aspirine. Mais lorsque la bactérie Helicobacter pylori est présente, responsable d’une inflammation de l’antre de l’estomac (gastrite chronique), la sécrétion acide est stimulée. Cette hypersécrétion acide fragilise à son tour la barrière de mucus, d’autant que celle-ci est plus mince au niveau du duodénum qui n’est habituellement pas un milieu acide. 

Certaines tumeurs, exceptionnelles, comme les gastrinomes du pancréas ou du duodénum (syndrome de Zollinger Ellison), sécrètent la gastrine. Cette substance favorise l’hypersécrétion acide et donc potentiellement la survenue d’ulcères. 

Le rôle du tabac dans la formation de l’ulcère est discuté. Il ralentirait plutôt sa cicatrisation.

Le terrain génétique peut prédisposer à des ulcères gastriques et donc à des cancers de l’estomac.

Qui présente un risque ?

Plus de 65 ans, Helicobacter pylori et antécédent personnel d’ulcère…

Parmi les personnes sous anti-inflammatoires AINS ou aspirine, les plus vulnérables vis-à-vis de l’ulcère sont celles ayant un antécédent personnel d’ulcère, âgées de plus de 65 ans et celles infectées par Helicobacter pylori.

Ces personnes à risque de complication ulcéreuse justifient la prise d’une protection gastrique par inhibiteur de la pompe à proton (IPP), médicament qui réduit la production d’acide par l’estomac. Il en est de même lorsque les AINS sont prescrits chez des patients traités par anticoagulants, antiagrégants plaquettaires ou corticothérapie.

Les examens

L’endoscopie digestive haute, dans le diagnostic comme la surveillance

L’endoscopie digestive haute (gastroscopie) permet de visualiser l’ulcère gastro-duodénal et de réaliser dans le même temps de multiples prélèvements (biopsies) au niveau de l’ulcère gastrique afin de vérifier d’une part l’absence de cancérisation et, d’autre part, la présence de Helicobacter pylori.

Un ulcère gastrique peut s’avérer être un cancer débutant. Il est donc nécessaire de contrôler la bonne cicatrisation d’un ulcère de l’estomac au moyen d’une endoscopie. C’est inutile dans le cas d’un ulcère duodénal.

Les traitements

Cicatriser l’ulcère et éviter les récidives

Outre la suppression des symptômes, l’objectif du traitement est la cicatrisation de l’ulcère. A noter, la plupart des ulcères cicatrise spontanément. 

Le traitement de l’ulcère repose sur l'arrêt des médicaments gastrotoxiques (AINS, aspirine) et sur la réduction de la sécrétion acide de l’estomac au moyen de médicaments anti-sécrétoires tels les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) ou les antagonistes des récepteurs H2 de l’histamine. Le taux de cicatrisation à un mois est de 90 à 95 % avec ces molécules. 

L’éradication de Helicobacter pylori lorsque la présence de la bactérie est attestée, évite les récidives et, ainsi, les complications à long terme.

En cas d’hémorragie digestive, l’endoscopie digestive permet de stopper la plupart des saignements (hémostase) en injectant localement de l’adrénaline et/ou en posant un clip sur le vaisseau responsable. L’endoscopie permet aussi de dilater les sténoses duodénales.

L’acte chirurgical est réservé aux hémorragies non contrôlées par endoscopie, aux sténoses en cas d’échec du traitement endoscopique (gastro-entéro-anastomose, résection) et aux cas de cancer gastrique où l’ablation de tout ou partie de l’estomac (gastrectomie) peut être nécessaire.

En cas de perforation, la suture chirurgicale de l’ulcère est la règle.

Copyright : © SNFGE, Société Nationale Française de Gastro-Entérologie
Expert / Relecteur : Pr D. Laharie / Pr C. Silvain
Rédaction : H. Joubert - Dessin : O. Juanati - Images : © Pr F. Zerbib
​Mars 2018